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Aujourd’hui, tout leader qui se respecte doit faire preuve d’empathie envers son équipe. Mais l’empathie se prescrit-elle ? Comment faire pour la développer ? Qu’apporte-t-elle au monde de l’entreprise ? Décryptage.


Je me suis toujours intéressé aux autres“, confie Bill Clinton dans son autobiographie, Ma vie. “Je voulais faire leur connaissance, les comprendre, ressentir leurs émotions.” Le Président américain faisait ainsi preuve d’empathie dans sa capacité à créer et tisser un lien de confiance avec l’autre, afin qu’il se sente totalement pris en compte. Une prouesse dans un monde où l’individu est sans cesse happé par les écrans et le flot incessant d’informations, incapable de se concentrer sur l’ici et le maintenant. D’après une application iPhone mise au point par un certain Matt Killingsworth, les pensées vagabondes occuperaient notre esprit plus de 47% du temps !

Plus leader que manager

« Le leader empathique, c’est celui qui découvre que la relation prime sur le contenu », martèle Franck Martin, auteur de nombreux ouvrages dont Le pouvoir des gentils et Managez humain, c’est rentable ! Plus que jamais, l’écoute active s’avère être une qualité indispensable pour quiconque souhaiterait faire preuve de leadership, et non pas simplement se cantonner au rôle de manager. Pour mémoire, le leader n’est pas forcément celui qui détient l’autorité dans un cadre hiérarchique, mais celui qui fait autorité, à l’instar de grandes figures internationales comme Gandhi ou Mandela. Pour Franck Martin, « la bienveillance, la pédagogie, l’empathie et la compassion étaient le seul moyen pour eux de construire leur crédibilité et d’espérer faire adhérer le plus grand nombre à leur vision ».

 

Mieux se connaître pour développer son empathie

L’empathie, c’est être capable de se mettre dans les chaussures de l’autre en intégrant ses critères, ses valeurs, son expérience. Franck Martin va même plus loin en parlant de compassion, « le stade ultime de l’empathie qui suppose l’acceptation inconditionnelle du point de vue de l’autre, même s’il diffère du nôtre », renchérit-il.

Pour y parvenir, l’empathie requière donc bien plus qu’un simple sourire de façade. Pour développer cette qualité, un vrai travail d’introspection s’avère nécessaire. Depuis 2007, Google a d’ailleurs instauré le programme Search Inside Yourself, qui insiste sur l’importance de la quête de soi, véritable prémisse à l’épanouissement de l’empathie chez un individu.

Méditation et empathie

Enseignante de la méditation et de l’intelligence émotionnelle, Holly Niemela intervient régulièrement au sein de grandes entreprises pour aborder cette question du leadership empathique. D’après elle, la pratique méditative permet justement de développer l’empathie. « Une étude réalisée par Tania Singer, spécialiste en neurosciences, démontre que la partie du cerveau utilisée pour développer la conscience de soi est la même que celle utilisée pour l’empathie », explique-t-elle.

La pratique de la Mindfulness – ou méditation de pleine conscience- permet de développer un regard panoramique en permettant à l’individu de s’ancrer totalement dans le présent et d’être à l’écoute de son environnement et sans jugement. « Cela permet de s’effacer pour observer ce qui se passe au sein de l’équipe par exemple », ajoute la spécialiste. Martin Barbier, Directeur de business développement d’une PME, assiste justement aux retraites estivales d’Holly. D’après lui, la Mindfulness lui a effectivement permis de développer une écoute plus active et attentive de ses collaborateurs dans l’entreprise.

L’importance de la congruence

Développer son empathie ne se décrète pas : cela se travaille et de surcroît, cela se démontre par le biais d’actions quotidiennes. « Pour créer une relation de confiance avec ses collaborateurs, le leader doit rester congruent », affirme Franck Martin. C’est-à-dire que ses actes doivent demeurer cohérents avec les valeurs qu’il proclame, et plus encore, celles qu’il défend intérieurement.

Le manque de congruence dans le monde des affaires ou la sphère politique est d’ailleurs au cœur d’un besoin profond de réformer le système. « La crise financière n’est qu’un symptôme de la profondeur de la crise », ajoute l’expert. Et la congruence ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise : d’après Holly Niemela, chacun doit aussi faire preuve d’empathie au quotidien, avec la boulangère, l’enseignant, le facteur. « Il faut œuvrer à chaque instant de notre vie pour créer une société avec plus de gentillesse, et créer ainsi plus de lien entre les gens », assure-t-elle. N’en déplaise aux détracteurs de cette vision angélique : la gentillesse n’est définitivement pas l’habit du plus faible.

@Paojdo